Majorité : les enjeux politiques toujours sans réponse

La rencontre de dimanche 22 mars 2015 à Kingakati, entre « faucons » et « têtes brûlées » (regroupées
au sein du G.7 : MSR, ARC, PDC, MSDD, Unafec, Unadef, Arco) de la Majorité présidentielle, n’a
toujours pas fini d’agiter l’environnement politique national. Si l’on se félicite, dans le camp des
affiliés de Joseph Kabila, de s’être dit des vérités les yeux dans les yeux et d’avoir partiellement lavé le
linge sale en famille, sous la modération d’Aubin Minaku après le retrait volontaire du chef de l’Etat,
les observateurs notent quant à eux que nombre de questions politiques sont restées sans réponses.
L’on pense notamment à la sensible question de la succession du chef de l’Etat, du calendrier électoral,
du découpage territorial, du dialogue inclusif réclamé par des forces politiques et sociales de
l’Opposition, de l’opportunité du recensement à piloter par le Bureau Central du ministère du Plan et
surtout des leçons à tirer des événements du 19 au 21 janvier 2015 à la suite du vote par l’Assemblée
Nationale de l’alinéa 3 de la Loi électorale faisant du recensement et de l’identification de la population
des préalables à l’organisation des scrutins de 2015 à 2016.
L’après-Kabila toujours flou
Un des enjeux politiques qui attend toujours d’être clarifié au sein de la famille politique du Chef de
l’Etat est celui de sa succession, pourtant irréversible au regard de la Constitution, qui limite à deux le
nombre des mandats présidentiels en RDC, et du calendrier électoral publié par la CENI (Commission
Electorale Nationale Indépendante), qui fixe au 20 décembre 2016 la passation des pouvoirs entre le
président élu et son prédécesseur. A 14 mois du dépôt des candidatures pour la présidentielle (06 juin
2016), les lignes auraient dû déjà commencer à bouger dans les rangs de la Majorité Présidentielle, en
termes d’expression des ambitions politiques des « présidentiables ».
Concrètement, les candidats potentiels à la succession  auraient pu déjà se manifester, même si au
niveau de la hiérarchie, on estime que l’heure n’a pas encore sonné pour discuter de l’après-Kabila, qui
est encore occupé à servir la patrie jusqu’au dernier jour de son mandat. Compte tenu du « vide »
successoral qui s’accroît au fur et à mesure que l’on s’achemine vers la présidentielle du 27 novembre
2016, le sentiment que ressent l’opinion est que les cadres de la Majorité ne seraient pas totalement
libérés du charisme d’un leader qui a du mal à se susciter un dauphin.
Du calendrier électoral
Aussitôt après la publication du calendrier électoral par la CENI, certains cadres de la Majorité ont
rejoint l’Opposition au sujet de la nécessité d’un dialogue autour de ce chronogramme, de manière à
organiser en priorité les élections présidentielle, législatives nationales et provinciales, constitutionnellement liées à la légitimité des institutions telles que le Président de la République, le
Sénat et l’Assemblée Nationale, et à repousser les élections locales au-delà de 2016. Le son discordant
entendu du côté des « alliés » du Chef de l’Etat exige une réponse, qui tarde à venir.
Cette question qui fâche ne devrait pas rester éternellement en suspens, car de nature à vicier le climat
préélectoral et à faire croire que la Majorité roulerait pour le report sine die des élections législatives et
présidentielle. C’est le lieu de souligner que sur la liste des contraintes internes liées à la mise en œuvre
du calendrier électoral, la CENI épingle comme responsables d’une éventuelle implosion de dates le
Gouvernement, le Parlement et la Présidence de la République, autrement dit la Majorité au pouvoir.
Découpage territorial
Le découpage territorial décidé en pleine année électorale 2015 apparaît, aux yeux de beaucoup,
comme l’agenda caché ficelé par la Majorité présidentielle pour retarder la tenue de tous les scrutins et
provoquer des prolongations de facto à durée indéterminée. Comme pour donner raison à ceux qui
pensent ainsi, plusieurs têtes pensantes de la famille politique du Chef de l’Etat se sont exprimées
publiquement contre sa mise en œuvre. Elles ont eu à démontrer que le pays ne réunit pas encore les
conditions financières, sécuritaires et logistiques indispensables à son éclatement en 26 provinces.
Cet argumentaire a apporté de l’eau au moulin des forces politiques et sociales qui pensent que les
tenants du découpage précipité du pays visent à priver le gouvernement des moyens financiers requis
pour la tenue des élections locales, municipales, urbaines, législatives et présidentielle. Ici aussi, la
Majorité présidentielle donne l’impression de ne pas entendre la voix de ses propres fils et filles qui
contestent l’initiative en interne.
Evénements de janvier 2015
La relecture des événements de janvier 2015 montre que le souverain primaire a désavoué ses « élus »
présents à l’Assemblée Nationale, majoritairement membres de la Majorité présidentielle. Cet
avertissement indique que la « majorité silencieuse » a d’ores et déjà rejeté en bloc toute option de
référendum constitutionnel, de révision de la loi électorale, de recensement et d’identification de la
population, de prolongation des mandats du Chef de l’Etat, des membres des Assemblées provinciales,
de l’Assemblée Nationale et du Sénat.
Le signal fort émis par la rue se veut à la fois une exigence du respect des textes dans la tenue des
scrutins de 2015 à 2016 mais aussi de leur caractère démocratique, libre et transparent. Le souverain
primaire tient à être le seul maître du jeu dans la quête de la vérité des urnes en ce qui concerne les
choix des chefs de secteurs et leurs adjoints, des conseillers communaux, des bourgmestres, de
conseillers urbains, des maires des villes, des députés provinciaux, des gouverneurs de province, des
sénateurs, des députés nationaux et du président de la République.
Le grand défi à relever par la Majorité présidentielle, c’est de démontrer, dans ses stratégies politiques à
venir, qu’elle a capté cinq sur cinq le message du souverain primaire. Dans le cas contraire, elle risque
d’aller de nouveau droit dans le mur, comme en janvier dernier.

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