RDC : bilan officiel, conséquences politiques... Retour sur les manifestations de janvier

Trois semaines après les troubles qui ont secoué la RDC en raison d'une révision de la loi électorale, les autorités congolaises ont revu leur bilan à la hausse. Il s'élève désormais à 27 morts, dont 23 à Kinshasa.

Bilans contradictoires

Le gouvernement congolais et les ONG n'arrivent toujours pas à s'entendre sur le bilan des troubles qui ont secoué en janvier la République démocratique du Congo (RDC) autour d'une révision de la loi électorale.
"Après avoir annoncé 14 morts, dont un policier, (...) le nombre de personnes mortes à la faveur de ces événements sur l'ensemble du territoire national est estimé aujourd'hui à 27 personnes tuées : 4 à Goma, 23 à Kinshasa", a déclaré jeudi 5 février le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende, lors d'une conférence de presse à Kinshasa.
Lambert Mende a précisé que deux policiers figuraient parmi les victimes et que trois enfants ont été tués à Goma, importante ville de l'est du pays.
Dans des rapports distincts, la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme et l'ONG américaine Human Rights Watch ont pour leur part estimé qu'une quarantaine de personnes sont mortes lors de ces troubles. "Au moins 21 de ces victimes ont été tuées par balles par les forces de sécurité congolaises", avait précisé Human Rights Watch, reprochant au gouvernement d'avoir "eu recours à une force illégale et excessive pour réprimer les manifestations".
Lambert Mende avait récusé les bilans des ONG, accusant la FIDH d'être "de plus en plus excessive" et de chercher à "nuire au gouvernement congolais". Il avait par ailleurs affirmé que les morts avaient été tués par des vigiles privés.

Trois journées d'émeutes

Du 19 au 22 janvier, essentiellement à Kinshasa, des manifestants ont dénoncé un projet de loi électorale qui aurait pu permettre au président Joseph Kabila, en poste depuis 2001, de rester au pouvoir au-delà de 2016, alors que la Constitution lui interdit de briguer un nouveau mandat.
Les manifestations avaient rapidement viré à l'émeute et aux pillages. Pour affaiblir la contestation, le gouvernement avait ordonné la coupure d'internet et des SMS. Depuis, l'internet fixe a été rétabli, mais malgré le retour au calme l'internet mobile et les SMS restent suspendus, sclérosant l'économie.
Lors de la conférence de presse, Lambert Mende a longuement dénoncé l'usage des réseaux sociaux pour mettre de l'huile sur le feu lors des violences, notamment par la diffusion de photos choquantes de crises se déroulant dans d'autres pays. Selon lui, couper l'internet a permis d'éviter une "guerre civile".
Le porte-parole du gouvernement a déclaré que le rétablissement de l'internet mobile et des SMS était "une question d'heures ou de jours. Dans tous les cas, nous n'entamerons pas la semaine prochaine sans que tout soit rentré dans l'ordre."
Après les troubles, il avait annoncé près de 350 arrestations. Bilan : "130 (personnes) à peu près, dont plusieurs étudiants et quelques adolescents mineurs, (...) ont été remis en liberté, (...) et 49 mineurs parmi les interpellés, qui ont agi, qui ont pillé, ont été mis à la disposition du juge des enfants".
Lambert Mende a ajouté que les premières condamnations commencent à "être prononcées" et que pour la réparation aux victimes de pillages, le gouvernement privilégiait la politique du "qui casse, paie".

Et maintenant ?

Le 25 janvier, le Parlement a voté une loi électorale débarrassée de la disposition la plus controversée, sans pour autant complètement rassurer l'opposition, qui y voit d'autres articles susceptibles d'entraîner un "glissement" du calendrier, faisant craindre de nouvelles violences.
Car si le recensement administratif de la population, qui n'a plus eu lieu dans le pays depuis 1970, est plus un préalable à l'organisation de la prochaine élection présidentielle, prévue en 2016, il s'annonce toute de même particulièrement long et complexe.
Combien de temps pourraient prendre ces opérations ? Les estimations d'experts indépendants varient entre vingt mois, pour les plus optimistes, et cinq ans pour les autres... Le professeur Grégoire Kankwanda, qui travaillait déjà sur ce recensement à l'Institut national de la statistique en 2010, avait estimé qu'il durerait trois ans. Et dans une interview parue dans Jeune Afrique en décembre 2014, le président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), l'abbé Apollinaire Malu Malu, s'était lui-même inquiété du "problème" que représentait le recensement pour le respect du calendrier électoral.


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